Anca Braescu
Université « Stefan cel Mare » Suceava
Diversité, flexibilité et créativité dans l’œuvre traductive d’Irina Mavrodin
Dans notre communication nous nous intéressons à l’œuvre traductive d’Irina Mavrodin, traductrice roumaine contemporaine qui a contribué à l’enrichissement de l’horizon littéraire du public roumain par la publication de plus de 70 traductions de textes du français vers le roumain, ainsi que trois textes du roumain vers le français. Cette impressionnante activité a engendré une approche théorique sur le traduire considérée très originale parmi les traductologues et qui complète la riche contribution d’Irina Mavrodin à l’ouverture de la culture roumaine vers l’ailleurs.
Nous concentrerons notre approche sur la dimension pratique de son travail, à savoir l’envergure de son œuvre, que nous analyserons à travers trois aspects que nous considérons essentiels: la diversité, la flexibilité et la créativité.
La diversité se manifeste sous l’aspect des genres littéraires traduits, sous l’aspect des époques différentes et souvent très éloignées qui sont rendues par la traduction et sous l’aspect thématique. En commençant par 1967, année de la parution de la version roumaine d’une anthologie de l’œuvre de Madame de Staël (Madame de Staël, Scrieri alese, trad. Irina Mavrodin, Editura Univers, Bucureşti, 1967) et jusqu’en 2011, Irina Mavrodin a publié des traductions qui comprennent des écrits d’art, sciences humaines, genre épistolaire et mémorialiste, poèmes, autotraduction de poèmes, théâtre, prose courte et roman. Ces ouvrages rendus en roumain proviennent d’espaces culturels différents: la France, mais aussi la Suisse (Albert Cohen), la Belgique (Amélie Nothomb), la Roumanie (Mircea Eliade) et des espaces culturels plus éloignés géographiquement et culturellement – l’Afrique (Calixthe Beyala). Cette distance géographique est doublée par une distance culturelle installée par la thématique d’ouvrages tels Salammbô (Gustave Flaubert), Robert des noms propres (Amélie Nothomb) ou Le Prince de Dieu. Sur les traces d’Abraham (René Guitton), où sont invoqués des espaces culturels tels la Carthage, le Japon ou Israël.
Se confrontant à cette diversité sous toutes ces dimensions, la traductrice fait preuve d’une flexibilité que nous essayerons d’approfondir à travers une analyse et une synthèse des ouvrages traduits en roumain et en français par Irina Mavrodin. Par quelles stratégies la traductrice réussit-elle à s’adapter à chaque fois à un nouveau texte, en quelle mesure elle a eu la liberté de choisir elle-même les textes traduits ou quels sont les justifications des choix traductifs faits, comment la créativité se manifeste-t-elle ?
Nous allons nous appuyer dans notre analyse sur l’appareil paratextuel – notes, commentaires, avant-propos – rédigé par la traductrice et qui encadre la plupart des ouvrages qu’elle traduit. Ces textes, ainsi que les textes théoriques sur la traduction rédigés par l’auteure et publiés dans des recueils, permettent au lecteur avisé d’entrer dans le laboratoire de création de la traduction et de découvrir la complexité de l’acte traductif, ainsi que les stratégies engrenées afin de dépasser de manière créative les difficultés qui se présentent. Par cette incursion dans l’œuvre traductive d’Irina Mavrodin nous visons à déterminer sa contribution à l’enrichissement de la culture roumaine, mais également à mieux définir le portrait de traducteur audacieux et complet qu’est Irina Mavrodin.